Sabine Pigalle

Née en France en 1963, Sabine Pigalle est une artiste visuelle privilégiant le medium photographique et qui s’inscrit dans la mouvance d’une nouvelle génération qui naviguent aux frontières troubles de la réalité et de la fiction. Après ses études en lettres modernes à Paris et avant de s’adonner à ses propres recherches artistiques, elle a notamment travaillé aux côtés de photographes de mode tels que Ellen von Unwerth, Jean-Baptiste Mondino, Peter Lindbergh, Helmut Newton.

Les principaux axes de son travail interrogent les mythes, le patrimoine, la notion temporelle, la mémoire collective, et se concentrent autour du portrait traité comme représentation d’archétypes décalés. Apparentée au mouvement de la Post-photographie, elle produit des œuvres transversales qui hybrident peintures et photographies, art ancien et art contemporain, figuration et abstraction. 

Ses oeuvres ont fait l’objet d’expositions personnelles au Musée Condé («Le Cabinet des Leurres», Château de Chantilly, France, 2023), au Musée Jean-Jacques Rousseau («Protopunk», Montmorency, France, 2023), à la Compagnie des Beaux Arts, («Time Remix », Luxembourg, 2022), au Palacio Cadaval («Mémoires d’Outre-Temps», Evora, Portugal, 2022), au Musée Fragonard («Mémoires d’Outre-Temps» Grasse, France, 2021), au Palazzo Bragadin («Le Musée Imaginaire», Venise, Italie, 2017), au Chanel Nexus Hall («Timequakes»Ginza, Tokyo, Japon, 2014), entre autres…

Elles ont également fait partie d’expositions collectives au Château du Rivau («Le Goût de l’Art, l’Art du Goût», Leméré, France, 2021), au Sammlung Friederichhoff («Electives Affinities», Vienna, Autriche, 2018), au Schloss Pörnbach («Anatomy of a Fairy Tale», Münich, Allemagne, 2018), au Musée Cognac Jay («Dédicaces et déclarations», Paris, France, 2015), entre autres…

L’artiste a également fait l’objet de publications : «Made in Yvrandes» (Éditions Lord Byron, 2022), «Blood and Fire» (Éditions Aka, 2021), «Coronabécédaire» (Éditions Intervalles, 2021), «Sabine Pigalle» (Editions Liénart, 2020), «Night Watch» (Éditions La Pionnière, 2017), «Protectors» (Éditions Intervalles, 2010), «Festins Libertins» (Éditions Intervalles, 2009), «Toxi-Food» (Éditions Intervalles, 2008).


Vermeer – Rembrandt

Série In Memoriam (2015-2020)

2020

Ink Jet Print sur papier

Hahnemühle Silk Baryta – 310 gr/m2

123 x 249 cm.

Dans la série intitulée « In Memoriam », l’artiste renouvelle la rencontre entre les territoires de la peinture et de la photographie, mais aussi entre l’art ancien et l’art contemporain, entre le portrait et le paysage traité ici de façon allusive, entre figuration et abstraction. Pour cette série comme pour ses précédents travaux, Sabine Pigalle interroge notre rapport à l’image, créant, à partir de références multiples, une mythologie contemporaine. Revisitant l’histoire de la peinture, documentant les oeuvres de portraitistes allant de la renaissance au dix-neuvième siècle, de maîtres flamands du siècle d’or, elle marie l’ancien et le nouveau.

Hooch – Barocci

Série In Memoriam (2015-2020)

2016

Ink Jet Print sur papier

Hahnemühle Silk Baryta – 310 gr/m2

123 x 249 cm.

Jouant avec les détails, combinant les références au moyen de techniques de compositions, de juxtapositions et de collages multiples, tant visuels que temporels, le travail de mémoire opère. Superposant et sédimentant des strates d’époques différentes, le temps, passé et présent, est mis en scène, ainsi que la trace laissée en chacun de nous. La référence aux vanités du siècle d’or Hollandais participe à l’expression de l’éphémère et de la fugacité, mais en même temps de l’intemporalité et de l’universel. Si le panneau central met en scène le souvenir, la dématérialisation de l’image dans les panneaux latéraux met en scène l’oubli, l’usure du souvenir. Ces panneaux racontent d’une manière abstraite l’image centrale, et en quelque sorte son l’ADN. Ces paysages abstraits ponctuent ainsi les portraits, telle les effluves d’une mélodie. 

 

After Rogier Van Der Weyden

Série « Timequakes » (2011-2014)

2012

Tirage Lambda sur papier Fujiflex Crystal Archive.

Verre musée anti reflet / anti UV.

141 x 121 cm.

Timequakes (Tremblement de temps) est consécutive a l’expérience que j’ai vécue en mars 2011 lors du tremblement de terre survenu au Japon. En guise d’exutoire, j’ai transposé le chaos des destructions matérielles en télescopage temporel. Ce sont des exvotos qui sont réalisés à partir de portraits humanistes ou de cour des XVème et XVIème siècles, entremêlés de portraits photographiques contemporains sur fond de flux lumineux.

After Lorenzo di Credi

Série « Timequakes » (2011-2014)

2014

Tirage Lambda sur papier Fujiflex Crystal Archive.

Verre musée anti reflet / anti UV.

141 x 121 cm.

Dans cette série, j’ai recyclé et recomposé des photographies que j’avais prises, compilées puis archivées afin de constituer des sources de productions futures : portraits de modèles a la beauté intemporelle, reproduction de peintures constituant mon propre musée imaginaire et images tremblées des lumières de Tokyo by night, métaphore du séisme. Ce procédé donne a voir des concrétions qui expriment la collision et la sédimentation du temps.

Anne #2

Série Protectors (2008-2010)

2009

Tirage Lambda sur papier Fujifilm Crystal

Archive Satiné – 260 gr/m2

121,5 x 121,5 cm

La série photographique intitulée « Protectors » traite de la perduration des mythes et de la cohabitation du monde profane dans la représentation du sacré. Elle juxtapose l’aspect corporatif de métiers reliés à la représentation superstitieuse de protecteurs. Dans la religion chrétienne a priori monothéiste, les cultes voués à tout un cortège de Saints renvoient à la pléiade de divinités rencontrées dans les civilisations antiques. Ces derniers constituent ainsi souvent les avatars de ces mêmes dieux, et assurent la survie de rituels ancestraux et de croyances païennes avec lesquelles l’Eglise s’est ultérieurement « arrangée ».

Ainsi, au Moyen Âge, les très puissantes corporations de métiers se regroupèrent sous l’égide et le patronage de Saints afin d’obtempérer au commandement de l’Eglise qui redoutait leur influence croissante et l’organisation d’un contre- pouvoir laïque. Les croyances et superstitions rattachées aux légendes des existences terrestres de ces «Idoles» variaient selon les régions et les époques, ce qui ajoute encore au folklore : très souvent différents saints furent proposés pour remplir la même fonction, de même que des fonctions variées furent attribuées à un même saint …

Honoré

Série Protectors (2008-2010)

Tirage Lambda sur papier Fujifilm Crystal

Archive Satiné – 260 gr/m2

121,5 x 121,5 cm

La série s’attache à illustrer librement et arbitrairement certains de ces « super- héros » d’autrefois, sous forme de portraits archétypes, parfois ironiquement oxymores et teintés d’étrangeté. Le traitement esthétisant renvoie à l’univers pictural : les icônes marmoréennes peintes de blanc, illustrant parfois le martyre subi, muni de l’attribut du métier représenté, baignent dans une lumière sépulcrale.

Evidemment, il s’agit là d’un travail de « représentation-digression » qui, à travers la fixité et la frontalité de l’iconographie médiévale, tout en limitant les éléments du contexte environnant, emprunte également à la statuaire du nu antique l’expression selon laquelle la beauté du corps exprime celle de l’âme, comme une tentative d’hybridation et de superposition de deux modes de représentation.

En outre, l’utilisation d’«objets-apanages» permet d’ancrer le travail d’une façon contemporaine dans la transposition du mythe avec des objets insolites de notre époque.

En conclusion, cette série traite d’un sujet qui est au cœur de la recherche artistique de Sabine Pigalle : l’héritage symbolique des mythes et leur imbrication dans notre culture moderne.

Dutch Last Supper

2013

Tirage Lambda sur papier Fujifilm Crystal

Archive Satiné – 260 gr/m2

123 x 303 x 4 cm

Lʼartiste, à travers cette oeuvre, interroge notre rapport à lʼimage, créant, à partir de références multiples, une mythologie contemporaine. En amalgamant des portraits photographiques et en réorganisant dans une nouvelle composition quantité de détails (puisés dans une centaine de tableaux de maitres du siècle dʼor hollandais), en combinant les références au moyen de techniques de juxtapositions et de collages multiples, tant visuels que temporels, le travail de mémoire opère : la version intitulée Dutch Last Supper renvoie certes par sa construction à une représentation conventionnelle de la Cène peinte maintes fois au cours des siècles, mais fait aussi référence aux grands tableaux des confréries autrefois peints par Rembrandt.